Au printemps dernier, Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires a confié à l’Odas, qui porte l’essaimage de la Journée citoyenne, une mission pour identifier des axes d’intervention souhaitable de l’état sur le développement de la citoyenneté et des solidarités de proximité dans les territoires. Interviewé par le Journal des acteurs sociaux pour son édition de septembre 2019, Didier Lesueur, directeur général, nous explique comment cette question est devenue centrale dans le travail de l’observatoire.
Depuis 2009, l’Odas soutient La Journée citoyenne, une “bonne pratique” repérée et expertisée par Apriles, son Agence des pratiques et initiatives locales (www.apriles.net). Depuis 2015, l’Odas et Mulhouse Alsace Agglomération (M2A) – en partenariat avec La Banque Postale, la CCMSA, EDF, Transdev et avec le soutien de l’Assemblée des Maires de France (AMF) – accompagnent le développement de la Journée Citoyenne sur l’ensemble du territoire français en faisant connaitre cette démarche aux élus et acteurs locaux, en les sensibilisant à la réponse que constitue cette Journée face au délitement des liens sociaux et des repères collectifs, et en proposant un accompagnement à la mise en œuvre. L’Odas anime par ailleurs le Réseau Journée citoyenne qui fédère les communes et les élus porteurs de la Journée citoyenne afin de favoriser le partage d’expériences, une culture commune et l’entraide.
Le Jas : Comment la citoyenneté s’est-elle invitée dans le cœur de métier de l’Odas qu’est l’étude des politiques sociales ?
Didier Lesueur : Nos travaux sur le terrain nous ont conduits à acquérir une conviction : la question sociale n’est pas seulement une question économique mais une question relationnelle, avec l’affaiblissement des liens sociaux avec l’aléa des repères partagés. Prenons l’exemple de l’enfance en danger : notre travail a mis en exergue que la majorité des enfants n’étaient pas menacés par des mal- traitances proprement dites, mais étaient victimes de parents n’ayant pas les clefs pour les éduquer correctement. Pour le dire rapidement, ces enfants étaient moins victimes de l’absence de biens que de l’absence de liens leur permettant de trouver auprès d’autrui des solutions à leurs problèmes en matière d’éducation, de travail, de dépendance, d’isolement… à l’origine des ces évolutions, on peut noter que durant ces 40 dernières années, l’épanouissement individuel a été encouragé aux dépens de ce qui relève de la vie en communauté. On a laissé s’effriter les mécanismes de construction collective. Il est donc indispensable de favoriser une citoyenneté active pour consolider le vivre-ensemble. Car la citoyenneté ne se résume évidemment pas à travailler, payer ses impôts et voter. C’est l’implication de chacun dans la société car nous sommes tous coresponsables de notre vie en société.
Le Jas : Comment la citoyenneté s’est-elle invitée dans le cœur de métier de l’Odas qu’est l’étude des politiques sociales ?
Didier Lesueur : Nos travaux sur le terrain nous ont conduits à acquérir une conviction : la question sociale n’est pas seulement une question économique mais une question relationnelle, avec l’affaiblissement des liens sociaux avec l’aléa des repères partagés. Prenons l’exemple de l’enfance en danger : notre travail a mis en exergue que la majorité des enfants n’étaient pas menacés par des mal- traitances proprement dites, mais étaient victimes de parents n’ayant pas les clefs pour les éduquer correctement. Pour le dire rapidement, ces enfants étaient moins victimes de l’absence de biens que de l’absence de liens leur permettant de trouver auprès d’autrui des solutions à leurs problèmes en matière d’éducation, de travail, de dépendance, d’isolement… à l’origine des ces évolutions, on peut noter que durant ces 40 dernières années, l’épanouissement individuel a été encouragé aux dépens de ce qui relève de la vie en communauté. On a laissé s’effriter les mécanismes de construction collective. Il est donc indispensable de favoriser une citoyenneté active pour consolider le vivre-ensemble. Car la citoyenneté ne se résume évidemment pas à travailler, payer ses impôts et voter. C’est l’implication de chacun dans la société car nous sommes tous coresponsables de notre vie en société.
Le Jas : Quels leviers préconisez- vous ?
D.L : Nos travaux montrent que les acteurs les mieux placés pour soutenir le développement de la citoyenneté sont les élus locaux et particulièrement les maires et leurs équipes. Il faut donc d’abord reconsidérer notre approche de la décentralisation. Elle ne peut plus être un mécano institutionnel visant à rééquilibrer les pouvoirs entre État et collectivités locales. Elle doit viser une finalité : la consolidation de la cohésion de la société. Il faut par ailleurs soutenir et promouvoir les initiatives qui vont dans ce sens. C’est ce que fait l’Odas avec la Journée Citoyenne que les lecteurs du Jas connaissent bien. Elle est emblématique, car c’est elle s’adresse à tous les habitants, quels qu’ils soient, redonne une place à chacun en les conviant à s’engager pour la collectivité. La finalité n’est pas l’activité elle-même
(chantiers, valorisation du patrimoine, transmission de savoirs, projets culturels…), c’est ce qu’elle permet : tisser des liens et faire société en somme. J’évoquerai aussi la logique de développement social, autrement dit une conception de l’action publique qui repose sur l’intégration de la question des liens et des repères dans l’ensemble des politiques engagées en plaçant les habitants en tant qu’acteurs. Il faut non seulement passer d’une logique de “faire pour” à une logique de “faire avec” les habitants. Mais pour que ça fonctionne, cela passe par l’instauration de nouveaux types de rapports entre les élus et leurs administrés. C’est dans les territoires où les élus font confiance que se développent le plus grand nombre d’initiatives citoyennes, et par ricochet, que croît la confiance des habitants envers leurs élus. C’est un cercle vertueux.